Les risques géopolitiques figurent dorénavant en haut de la liste dans les perspectives économiques publiées par les organisations internationales. Le défi pour les économistes est de pouvoir prédire et « quantifier » les conséquences économiques des tensions géopolitiques et des conflits armés. De grandes tendances peuvent bien sûr être tracées en ce qui concerne le commerce et l’investissement (fragmentation) et l’efficacité du multilatéralisme (affaiblissement et polarisation).
D’un point de vue économique, et si l’on considère spécifiquement les conséquences d’un processus de réarmement à venir et l’augmentation attendue des dépenses militaires, il y a deux aspects à prendre en compte :
- L’impact sur la politique budgétaire : l’augmentation des dépenses militaires pourrait compliquer les arbitrages budgétaires. En période d’assainissement des finances publiques, cette hausse pourrait en effet se faire au détriment des dépenses axées sur le développement durable, l’éducation, la santé, les infrastructures et la transition climatique. Pour l’Allemagne, l’Italie et l’Espagne, le passage à un budget de défense à 3% du PIB équivaudrait à près de 40 % de l’ensemble de leurs dépenses publiques consacrées à l’éducation.
- L’impact sur la croissance: est-ce qu’un euro dépensé pour la défense apporte plus, ou moins, à la croissance économique qu’un euro dépensé sur d’autres dépenses publiques? La réponse n’est pas si claire que cela. Le lien entre dépenses militaires et croissance économique est relativement peu exploré dans la littérature économique.
- Naturellement, l’industrie de la défense devrait être un bénéficiaire net de tout processus de réarmement à venir. Au cours des 12 derniers mois, le S&P 500 s’est contracté de plus de 5%. Pourtant, presque tous les grands producteurs d’armes ont vu leur capitalisation boursière augmenter de 5% ou plus. La capitalisation des entreprises européennes a littéralement grimpé en flèche.